Archives de Catégorie: gay, père et passe

The end

Quand un monument est détruit, volontairement ou non, il laisse un vide, spatial certes, mais également dans nos esprits. Depuis la disparition du mur de Berlin, depuis l’effondrement des Twins Towers de New York, on n’arrive toujours pas à construire des clés de compréhension du monde d’aujourd’hui.
Depuis quelques jours, un blog a fermé. Temporairement , j’espère. Pour moi, c’est un grand vide, même si son auteur n’écrivait plus beaucoup ces derniers temps. Il avait l’avantage de la sincérité, avec un style attachant, fort, de belles formules, et un regard sur l’autre plein d’affection, de tendresse et d’humanité. Si j’écris sur mon blog, si j’écris sur « une fois par moi », c’est grâce à lui. C’est lui qui, à la suite de mon premier billet (et d’ailleurs suite à un quiproquo, je le prenais pour un autre), m’a encouragé à aller plus loin (mais comment a-t-il pu sentir tout ce que j’avais envie d’écrire, je ne me l’expliquerais jamais?), à écrire régulièrement, à me lancer.
Aujourd’hui , il a besoin de prendre du recul. Il a décidé de quitter « une fois par moi », après avoir fermé son blog.
Il m’a amicalement demander d’écrire ce dernier billet du 3 de son moi d’ « une fois par moi ». Cela fait bientôt 15 jours que j’y réfléchi pour écrire quelque chose d’original, de sympa, de percutant. Mais je ne peux que rester sobre, parce que célébrer le vide qu’il laisse n’est pas très excitant, et puis, il n’est pas mort non plus, et ce n’est pas une nécrologie que je dois écrire, mais une absence que je veux commenter.
Et ça , en fait, c’est bizarre. Il est là, mais il n’est plus là en même temps. C’est une sensation des plus étrange. Encore plus étrange quand on sait que l’on ne s’est rencontré en réel qu’une seule fois, dans un café parisien pendant deux heures à discuter de pleins de trucs que de vieux copains pourraient échanger lors de retrouvailles. Etrangeté de cet internet qui permet à certains de se connaître, de se découvrir mutuellement virtuellement peut-être plus que si l’on s’était rencontré dans la vie réelle.
Je pense qu’il vous salue avec la plus grande amitié, et j’ose croire qu’il reviendra sur la toile, en tant que 14141, ou sous un autre pseudo.
A toi, Daïdou, que ton chemin à venir s’ouvre avec le plus grand bonheur, comme tu le souhaites. Longue vie, et reviens nous avec encore de belles histoires!!!

PS: pour ceux qui veulent, le 3 du moi est libre. Contactez le redac chef!!!

Arthur

Gay père et une passe : la pute? c’est moi!

« Un soir de cette semaine après trois pannes successives, mon P’tit Zèbre, pour lequel l’amant que je suis n’a que très rarement défaillit à son contact, s’étonne et s’inquiète. Il est vrai que la toux et la gastro-entérite accumulées ces derniers temps, on eu des répercutions inattendues sur ma libido. Je le rassure tant bien que mal. Mais vient alors la grand question: « Au fait, les femmes, ça ne te manque pas? »

Mais je suis entouré de femmes, chéri: ma mère, mes soeurs, ma fille, mon ex-femme, sa copine, et puis mes nombreuses collègues de travail… non, les femmes ne me manquent pas. Sexuellement peut-être? C’est vrai que j’ai eu un passé riche en expérience hétérosexuel et sans me vanter, les femmes n’étaient pas insensibles à mon charme viril, à la douceur de mes câlins, et ma carrure rassurante comme je n’étais pas insensible à la douceur de leur peau, à leurs courbes sensuels, aux multiples parfums qui s’émanent d’elles et à l’abandon entre leurs seins. J’avais rapidement compris mes atouts à mon adolescence, les mettant en application avec discernement avec des femmes, ou des hommes. Aussi quand je suis arrivé sur Paris en 1990, un peu fauché, vivant dans un sept mètres carré, au sixième, sans eau chaude, j’ai mis à contribution mes talents innées.

Je cherchais un petit travail d’appoint pour me payer comme tout à chacun des fringues, des restaurants, et surtout assouvir ma passion dévoreuse d’argent, le cinéma. J’avais trouvé rapidement un job, je devais vendre une revue de cinéma directement sur le trottoir de la capital. Mon district: le 14ème – Montparnasse. J’arpentais ainsi comme une prostitué les grands boulevards avec mon paquet dans les mains, à arrêter les passants et les passantes ou bien encore à remonter les files d’attentes des salles de cinéma. Je ne me faisais pas énormément d’argent dans les premiers temps.

Un début d’après midi, j’accoste une très belle femme, la cinquantaine à peine. J’essaye de lui vendre ma feuille de choux. Elle me dévore des yeux et me propose de me prendre la totalité de mes revues si je la suis chez elle. Je ne sais pas pourquoi mais j’ai accepté, son charme, sa beauté, ses jambes longues et fines, peut-être. J’ai passé l’après-midi, dans son lit à la barbe de son mari. C’est elle qui m’a appris tous les gestes, les caresses, les zones érogènes que les femmes apprécient particulièrement, m’encourageant à adopter tels ou tels attitudes. En me raccompagnant à la porte, je l’embrasse dans le coup en la remerciant de ce délicieux moments. Elle me tend alors un pascal (500 francs – 76 euros). Je me refuse à les prendre, lui expliquant que je ne l’ai pas fait pour ça, elle insiste, elle a un garçon de mon âge, elle sait que nous avons des besoins matériels et puis que ça ne lui manquerait pas , son mari à une très bonne situation. Elle insistait, je refusais. Et puis elle a trouvé une faille: « si je ne te paie pas, j’aurais l’impression de tromper mon mari »; cela a du créer une résonance psychique (voir article) et j’ai accepté. Elle est revenu régulièrement sur mon lieu de travail, envoyant à l’occasion quelques unes de ses amis…

Je suis devenu à ce moment là, une pute, une vrai, qui accepte qu’on lui achète des fringues de marque, des chaussures, qu’on lui paie, sa facture de chauffage ou d’électricité ou sa carte UGC 12 mois… j’avais une bonne petite clientèle de femme de quarante à soixante ans qui m’appelaient l’étalon noir (pour mes yeux bien sur!). J’ai mis fin à cette activité lucrative avec un léger regret mais c’était devenu trop dangereux pour moi. Mais je me rappellerai de chacune d’elles car je les aimais à ma façon. Je me souviens de ces longues préliminaires dans leurs lits, de ces heures de « va et vient » alliant tendresse, vitalité, sensualité (j’ai une très grande résistance sexuelle surtout en utilisant les capotes).

Mon p’tit Zèbre est au courant de mon passé de pute et il aime que je lui raconte les sensations que l’on éprouve lorsque l’on pénètre une femme mais les détails lui soulèvent le coeur. Aussi dimanche matin, quand il s’est levé, il était de mauvaise humeur, grognon, je connais cette tête, c’est celle des nuits ou il a fait un cauchemar! Je lui demande de me le raconter: « ‘Tu étais allongé nu dans une pièce, et entouré de femmes: ta mère, tes soeurs, ta fille, ton ex-femme et sa copine, et puis tes nombreuses collègues de travail, elles étaient toutes là et tu leur faisais l’amour!

Heureusement que ce cauchemar ne vient pas de moi, car j’en prendrais encore pour 10 ans de psychanalyse!!!! »

Petite vidéo : ici
Daïdou – 14 141

 

Dedipix, Yoann Gourcuff et Gay Pride: Naissance d’une douleur

Ça devait être son onzième gâteau d’anniversaire ou son dixième, je ne me souviens plus trop, c’était son anniversaire, avec des bougies, une tarte au citron, ça j’en suis sûr. C’était son gâteau préféré, la tarte au citron. C’est toujours un moment émouvant pour un parent, de voir sa progéniture grandir, s’éloigner de vous , chaque jour un peu plus, inexorablement, un peu plus.

Ça a été son onzième gâteau d’anniversaire ou son dixième, je ne veux plus trop me souvenir, c’était son anniversaire sans bougies, sans gâteau, j’en suis sûr. C’est des anniversaires que l’on ne fête pas vraiment, par peur, par superstition. Ca reste un moment émouvant pour un enfant, de voir sa mère, à ses côtés, près de vous, chaque jour un peu plus avant que cela ne cesse.

1995, 24 décembre, 4h15 du mat, maternité, troisième étage, porte 302, Céline est allongée dans le lit. C’est de la toile de verre peinte, blanc cassé qu’il y a sur les murs, c’est une mode, c’était surtout pratique à poser. Les murs avaient un léger relief nid d’abeille. Avant ils étaient peints, lisses, pas de fioritures avec les traces de chariot, des bignes et des quelques trous dans les murs.

ll y a avait deux lits presque jumeaux, à touche touche et dans l’autre lit, personne pour le moment, une chaise de cantine, une table de chevet à roulettes ainsi qu’un plateau pour seul ameublement. Céline avait perdu les eaux, il lui ont installé un monitoring et elle s’est couchée sans douleur. Je suis resté un peu, pas longtemps, juste pour me rassurer que le travail ne s’était pas mis en route et puis je voulais être là tout simplement, pour elle. L’infirmière est venue, elle m’a réveillée, je dormais le dos cassé sur la chaise molletonnée. Faut pas rester là qu’elle m’a dit, faut rentrer chez vous, c’est pas pour tout de suite.

J’avais peur, angoissé, mais je suis rentré docilement , résigné à que cela ne soit pas cette nuit, celle où j’allais devenir père. Je suis revenu dans le milieu de la matinée, inquiet de la retrouver avec le bébé dans les bras. Le travail venait à peine de commencer et Céline avait mal. J’étais là aux petits oignons, peut-être un peu trop à son goût; elle m’envoyait balader. Je m’y étais préparé, je sais que la douleur était insupportable. Alors, j’ai encaissé toute la journée. En fin d’après-midi, il y a Marie qui a débarqué avec son mari, elle a pris le second lit. Ils ont pris tout l’espace, parlant fort, rigolant, alors que ma douce souffrait. Marie, c’était son troisième de mouflet, alors l’accouchement, elle maîtrise. Pas de surprise pour elle, elle est venue ici comme on vient faire ses courses. Marie, c’est une rigolote, elle cherchait à dédramatiser en plaisantant, en se moquant gentiment des contractures, de Céline épuisée. Mais elle s’est tu d’un coup d’un seul, il était pas loin de 21h00. Céline venait d’être soulagée par la péridurale, quand Marie a commencé à gueuler, à insulter son mari Paul, à balancer tout ce qui était à la porté de ses mains, une véritable hystérique. C’était drôle et effroyable.

Il fallut attendre encore une bonne heure avant qu’elles soient amené en salle de travail. Paul et moi, on nous y avait jeté. Ce n’était pas le moment, la sage femme voulait prendre le temps avec ses patientes sans les pères. Alors on a attendu, dans le couloir, à se parler. Et puis Marie à hurler : Paul!!!! Il s’est précipité, me retrouvant seul dans cet immense couloir.

– Non, je veux rien! Je veux la sage femme, je suis en train d’accoucher! Bordel! Tu vois pas ses cheveux, au mioche! Mais putain regarde! Non, cours vite! Il arrive!

Paul s’est précipité dans la salle où se trouvait Céline. Je le revois, le regard affolé.

– Monsieur, veuillez sortir immédiatement! Vous faîtes peur à ma parturiente! Allez calmer votre femme, j’arrive.

Elle y est allée le pas décidé, mais pas pressé non plus, pourtant  le chiard est arrivé trois minutes tard tout au plus.

Et puis ça a été notre tour. Ana est née le 24 décembre 1995 à 23h17.

Je me souviens être arrivé chez mes parents pour leur annoncer. J’étais ému.

Le lendemain, ma famille est passée à la maternité. J’étais l’homme le plus heureux du monde. Ma mère a pris sa petite fille dans ses bras et s’est mise à pleurer. Elle est venue me voir plus tard, ma mère, dans le couloir, elle avait quelque chose à me dire d’important.

– On vient de me diagnostiquer un cancer du sein. Il est très agressif. Je ne sais pas si nous arriverons à temps pour l’endiguer. Mais une chose est sûr, c’est que je souhaite de tout mon coeur voir ma petite fille grandir.

Ça devait être son onzième gâteau d’anniversaire ou son dixième, je me souviens plus trop, c’était son anniversaire, avec des bougies, une tarte au citron, ça j’en suis sûr. C’était son gâteau préféré, la tarte au citron. Elle fut gâtée comme un enfant peut l’être ce jour là.

Ça a été son onzième gâteau d’anniversaire, je me souviens maintenant, c’est son anniversaire sans bougies, sans gâteau, j’en suis sûr. C’est un anniversaire pas vraiment comme les autres. Sa petite fille est devenue grande et elle est toujours là. Elle est en vie et son cancérologue lui a fait son plus beau des cadeaux, lui offrir un mot, un seul: guérison.

Daidou


11

Je n’épiloguerais pas sur la pauvreté de ce post et son manque d’originalité. Je n’ai pu écrire un seul mot durant ces vacances, je m’en excuse. Aussi je me rattraperai pour le 03 février. En attendant cette date :

Onze, dix, neuf, huit, sept, six, cinq, quatre, trois, deux, un : que cette année vous soit la meilleure possible!

Daïdou

p’tit conte de Nau berrichon

La campagne était froide à c’t heure là. Le vent claquait et balayait le givre sur la route déserte. Les arbres s’agitaient au rythme du tribou* et la lumière faiblissait de minute en minute. Le bar-tabac affichait complet, Mme Chamaille trônait derrière sa caisse à arreuiller** les hommes sirotant leur p’tite goutte. Le froid avait gelé les parlements, pas mouches qui pètent, qu’on entendait, seule la campaine**** tintait quand l’un d’eux partait ou rentrait.

Nous, on était en face, ou presque de l’autre côté de la rue, juste sur la drette de la maison au volet rouge, c’est là que se trouvait l’école, toute une ribambelle d’agouant mal dégrossis à arder**** par d’ssus le muret, pellu***** de cagoule en laine qui gratte et de gants troués. On avait beau s’dégoudir les doués en soufflant dedans, il y avait plus de trous que d’laine. Alors on zieutait le bar-tabac comme si on allait le braquer. C’est exactement cela ! On attendait avec impatience, la fin de l’école pour aller la dévaliser, car c’était le jour ! Celui où la mère Chamaille recevait les sucres d’orge de Noël, des bâtonnets en forme de canne, rouges et blancs.

M. Légron, notre instituteur, nous guettait de la véranda, il devait aussi parler avec Madame, sa fumelle. On cherchait toujours à les espionner habituellement, mais là, l’affaire était trop sérieuse. Nous élaborions dans nos têtes des stratègies pour prendre d’assaut le bar-tabac. On s’est tous tourné à son signal, M. Légron venait de taper deux fois dans ses mains, et comme nous étions une petite troupe très obéissante, on s’est mis deux par deux devant la porte de la véranda. Fallait pas manquer l’appel !  Ça non ! C’était pas un drôle le monsieur Légron ! La chaleur nous étreignait lorsque nous franchissions le perron, mais pas que la chaleur, les odeurs aussi, celle du bois de chêne des bureaux franchement cirés et puis surtout celle du goûter qui nous attendait.

C’était mon dernier goûter de Noël. Je ne le savais pas encore, je sentais bien qu’il y avait quelque chose qui se tramait. J’avais volé quelques bribes de conversation entre mon père et mère, un soir juste après mon bain. Ils n’avaient pas remarqué ma présence.

–       Tu as des nouvelles pour Rennes ? s’enquit ma mère
–       J’ai une autre proposition en Normandie pour le mois de Septembre.

Normandie, Rennes ? C’est quoi, c’est où ? C’est qui ? Je n’avais pas vraiment compris les enjeux de ces mots. Le temps n’avait aucune emprise sur moi, j’étais insouciant.

On se dispersait les uns derrières les autres dans nos classes respectives. Les mains devant nous sur la table tendues, je jetais un coup d’œil par la fenêtre : je serais le premier si je cours le plus vite, je pourrais m’acheter mes deux friandises.

–       Les enfants, on va tous aller dans quelques instants dans le réfectoire, dit solennellement M. Légron. Une surprise vous y attendra.

On n’y tenait plus. Bruno, mon meilleur copain, se leva un petit peu trop brusquement :

–       Faux départ ! Veuillez vous assoir à nouveau et dans le calme!

Je l’ai fusillé du regard, le Bruno, je me souviens bien ! A cause de lui, la classe d’à coté est parti avant nous. C’est lorsque le bruit des pas sur le parquet se sont éteints que M. Légron nous invita à rejoindre nos camarades. Devant nous se dressait une table avec un bol en verre qui se casse en mille morceaux lorsqu’il tombait par terre, et juste à côté de celui-ci, une orange et deux grottes en chocolat. Il aurait fallu immortaliser cet instant, tous ces yeux rivés sur la dame de cantine. Je me souviens de son goût de ce lait chocolaté, de cette ambiance de recueillement, de cette chaleur humide, du givre sur les fenêtres, de ce bien être paisible qui s’était installé entre nous. L’après-midi passa rapidement afféré à nos occupations de décorations. Une atmosphère de joyeuse communion s’était installée. Elle perdura jusqu’à la fin de la journée. Et puis la tension monta d’un cran. Je m’étais préparé à l’assaut final. Quand le départ fut donné, je me précipitais le premier dehors tel un guerrier en furie, j’enfilais mon manteau et passai ma cagoule d’un geste, d’un seul.

Je franchis le seuil de la porte le premier, suivi d’une dizaine de mes petits camarades. Je fus le premier servi, mais au moment de payer, mes poches étaient vides. Mon franc avait disparu. Ma peine devait se lire sur mon visage. On pouvait pas dire qu’elle était très aimable, ni qu’elle aimait les enfants, mais elle avait bon cœur cette dame. En me tendant mon sucre d’orge, elle me dit : « Tiens barbouillaud, t’a pas d’picaillon mais agrape le quand même. J’te souhaite joyeux nau****** ! »

Je vous souhaite de joyeuses fêtes de « Nau » avec ou sans picaillon dans votre pochon!

 

Daïdou

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tribou* : Tourbillon de vent
arreuiller** : Regarder avec des yeux vifs
campaine***: un cloche
arder****: regarder
pellu*****:  couvert
les doués : les doigts
Nau******: noël

Streap poker, pipe, Dedipix, Lady Gaga, baisée par son médecin? Un Adieu…

J’ai mis mon dernier carton dans ma deuche et me voilà définitivement parti. C’était, il y a maintenant 4 ans, 5 mois, 2 jours et 10 heures. Je préparais mon départ depuis 2 mois et je me retrouvais face à mes choix. La réflexion n’était certainement pas aboutie: je partais, car je n’aimais plus Céline, voilà tout. J’aurais sans doute préféré rester dans mon petit confort dans ma belle maison normande, restaurée à la force de mes bras, entouré de mes deux petites têtes: brune et « châtaigne ». J’aurais pu la tromper dix ans encore avant de renoncer à cette double vie, apostasier ma sexualité; j’aurais pu rester sourd à ses gueulantes brusques et imprévisibles qui s’abattaient sur les enfants ; pour un oui, pour un non; j’aurais pu supporter son régime radical jusqu’à devenir un véritable squelette comme elle. J’aurais pu renoncer à vivre, à ressentir à nouveau la puissance des sentiments et à me complaire dans une morosité presque parfaite où l’attente était la seule occupation véritable qui m’entraînait pas à pas à ma perte.

L’atmosphère était lourde ce jour-là. Les thuyas de la voisine dansaient, les nôtres étaient morts, arrachés un par un jusqu’à la racine. Ceux-là tanguaient légèrement au vent, j’y voyais une invitation. Je ne connaissais pas vraiment la destination, mais j’avais confiance en cet appel. Minutieusement, j’avais préparé mon paquetage, la veille. Nous avions séparé nos livres, nos CD, nos DVD, nos meubles, nos cadeaux, nos photos. La culpabilité m’interdisait de solliciter mes dus. J’étais partagé entre  le « laisser derrière soi » une trace, un repère pour les enfants, des objets transactionnels comme ils disent les psychiatres, ou de s’effacer pour ne laisser que des murs vides, désolation de cet amour. On ne se chamaillait pas, le calme régnait, pesant, étouffant. Une réflexion, un souvenir nous étreignaient quelque temps, suspendant ce partage diabolique. Je lisais sa souffrance sur sa peau, sur son visage tiré dans ses yeux embués. Nos gestes étaient appliqués dans la lenteur, nous rappelant que nous vivions nos dernières heures ensemble ; retenus, aussi, lents appliqués et retenus nos mouvements ; ils étaient de circonstance.

On ne part pas comme ça, ou pas moi. Moi, j’avais mis en scène mon départ. Il me fallait la chose symbolique, l’objet de cette liberté. La seule qui m’est venue comme idée, la deux-chevaux, celle de mon oncle Thibault, une 2CV6 charleston.

C’était mon premier souvenir d’évasion, je devais avoir 13 ans. Ce dernier m’invita à traverser la France en long, en large, et en travers avec ma cousine et sa deuche. Bordeaux et noir, elle était, en triste état aussi ! Pas étonnant lorsque l’on connaît le personnage. Ce peintre en bâtiment, converti au catholicisme, vivant avec une femme libérée qui se tapait tous les diables possédant une bite et deux couilles, utilisait sa voiture comme véhicule professionnel! Les sièges et la carrosserie atteignaient leur limite de vie en quelques mois seulement.

Ma cousine et moi, on était comme cul et chemise, toujours à faire les quatre cents coups, et les pires dingueries. Je devais certainement être un peu amoureux d’elle, cela devait se voir, mon cœur se soulevait dès que le son de sa voix me parvenait. Elle était parisienne et moi pas. Elle se frottait régulièrement à des fils et filles de personnages médiatiques, avait pour copine des actrices en herbe et se voyait déjà spationaute, arpentant fièrement les plateaux télé pour témoigner de son expérience. Elle n’a jamais eu son BAC scientifique, ni un autre d’ailleurs. Elle est vendeuse de fringues aux dernières nouvelles. Nos rencontres se limitent aux mariages, de moins en moins nombreux et aux enterrements de plus en plus fréquents.

La Sarthe, la Touraine, l’Anjou, l’Auvergne, la Bretagne et puis la Gascogne, que l’on a sillonnés, la capote roulée, à ciel ouvert, contemplant les nuages, allongé sur la banquette arrière, je méditais. Je détenais cette vulnérabilité, cette maturité que les jeunes filles de mon âge développaient avant les garçons. J’étais la coqueluche de ces gentes demoiselles, le seul approchable à leurs yeux, effarouchées par les discours inintéressants du « sexe fort ». Le fossé se creusait inévitablement entre mes congénères et moi ; pourtant j’aimais bien leur présence, aux gars, surtout leurs muscles et leurs culs. Je les regardais avec attirance et répulsion, jouissant de détenir le secret qui pouvait les faire aimer des jouvencelles convoitées. Parce que j’étais tout le temps fourré avec des filles, j’étais devenu leur mascotte et l’agent secret des mecs. Parce que je les observais, et les écoutais, les filles, je connaissais leurs moindres secrets et désirs. « Tu penses qu’Alexandra, elle voudrait bien sortir avec moi ? » « T’as aucune chance, elle préfère Mathias. Tu peux toujours l’inviter au cinéma samedi voir « Falling in love ». Je crois qu’elle avait vraiment envie de le voir. »  « Très peu pour moi, c’est un film de gonzesses ! » Et c’était vrai, c’était bien un film de filles. Alexandra, c’est moi qui l’ai conviée au ciné, et c’est moi qui suis sorti avec elle. J’ai mis ma langue dans sa bouche, dans son trou, à Alexandra et j’ai touché sa chatte à travers son slip tout du long de la projection. Sa petite culotte était toute humide à la fin. Ça n’a pas duré, tous les deux : comme d’habitude, deux semaines tout au plus, je ne me souviens plus. Je garde en mémoire qu’un seul détail d’elle : ses dents extraordinairement blanches. C’est affligeant de ne plus être capable de se remémorer un visage.

 

Cet été-là, j’en ai vu, du paysage, à travers cette voiture. Elle m’emmena loin du drame familial. Le père avait encore trompé la mère, et ma mère se remettait très doucement de sa tentative de suicide. Il était bon de se laisser aller sans contrainte dans cette voiture. Les odeurs d’huile chaude, de solvants, de peinture, me donnaient parfois mal à la tête, mais me réconfortaient étrangement.

On ne part pas comme ça, ou pas moi. Moi, j’avais mis en scène mon départ. Je me souviens d’avoir rêvé devant des annonces. Pas une ne me convenait, trop cher, pas assez dans son jus, et puis il y a eu cette « 2deuche » aux phares rectangles, bleue, banquette avant arrière déchirée tout comme moi je l’étais. Je suis allé la rencontrer et suis reparti avec. Elle fut capricieuse, mais on l’aimait bien, Céline un peu moins. Elle savait que cette voiture ne resterait pas, qu’elle partirait avec moi. C’est ce que j’ai fait le jour de mon départ. J’avais enlevé la banquette arrière, et j’y ai entassé des caisses de souvenirs, et je l’ai quittée, ma femme. Elle n’était pas là à me faire signe en guise de bon voyage ; dans mon rétroviseur, il ne se reflétait que les thuyas de la voisine. Ils se balançaient de droite à gauche comme le fait une main pour dire adieu.

 

Daïdou

Ps: Le titre est un peu « putassier » mais la fin justifie les moyens…???

Anniversaire, père et passe

Mon père tringlait tout ce qui bougeait. Je sais pas si c’est de famille, et puis je m’en fiche un peu de savoir si la libido est héréditaire ou pas. Quelle importance après tout ? Ça n’aurait fait aucune différence. Mon pater c’était ce genre de mec qui avait un physique de rêve : tablettes abdominales, brun, poilu, peau mate, un sex-appeal effroyable. Je crois l’avoir perçu assez rapidement.


Je n’avais pas sept ans. J’allais dans la salle de bain alors qu’il n’était pas encore tout à fait habillé, son slip blanc ressortait sur son teint et je le regardais se raser lentement, le blanc de la mousse contrastait sur ce visage embrasé par le soleil d’Afrique. Je doute que je maitrisais alors les érections, je savais ce que c’était, mon père me l’avait appris : « C’est quand ton zizi est tout dur quand tu regardes une jolie femme… »

Pas que, cher père ! En me délectant du spectacle qui se déroulait devant moi, je bandais. Ça ne se voyait certainement pas, un petit truc de rien du tout, mais je la sentais bien cette bandaison en te regardant. Je m’amusais à prendre des positions indolentes pour entrevoir ce qu’il y avait dans ce foutu slip blanc ; parfois même je glissais un doigt au niveau de ta colonne vertébrale et descendais jusqu’à l’élastique ; je le soulevais légèrement pour entrevoir tes fesses bien dures et le relâchais dans un clac qui te surprenait à chaque fois.

J’aimais tellement ses sous-vêtements que je les lui volais sur son étagère afin de m’en faire des doudous. Sentir le coton épais de son slip contre ma joue, renifler la lessive, caresser l’endroit interdit, faire comme si c’était pour de vrai. On dira que je jouais, mais je ne savais pas vraiment à quel jeu je jouais. L’instinctif ?
Ma mère avait découvert ma cachette sous mon matelas, sans mot dire, elle les récupérait.

Mon père n’était pas vraiment présent préférant s’occuper de la femme de son meilleure pote. Elle était plutôt pas mal, pas grand chose dans la tête, mais elle suçait bien : c’est mon vieux qui me l’a dit. Il la culbutait, la vergeait dès qu’il avait un moment de libre. Son pote, il disait rien, il regardait simplement. Je pense qu’il se paluchait aussi devant ce spectacle. Ma mère, elle, ne se doutait de rien. Moi, la Elisabeth, je l’aimais pas trop, bien qu’elle m’ait permis de voir ma première érection à travers un pantalon.

Un dimanche ou un samedi, je ne sais plus trop.
Mais le souvenir est clair : je passe sous la table discrètement. C’est un jeu d’enfant mais pas vraiment innocent… Ce qui m’attirait : les jupes des femmes et les entrejambes des mecs.
Ce jour-là, je me suis approché de mon père, une main de femme lui caressait sa bosse. Je ne l’avais jamais vue comme ça ! Elle était bien grosse. La main s’est introduite dans l’entrebâillement de la fermeture éclair.

Je trouvais la situation particulièrement amusante, ce ballet de mains interdit. Je me taisais, j’observais voilà tout. Je n’ai rien dit à ma mère, ni à mon père. J’avais peur, une peur sans mots, d’ailleurs ils ont manqué les mots à mes parents quand on est parti du village. Il y en avait pourtant plein d’écrits sur le mur de la maison : « enfoiré », « saleté », « surveille ton mari salope », « sale juif », je n’arrivais pas à les lire mais j’ai vu ma mère s’esquinter les mains à force de frotter ces inscriptions noires de calomnie. Je me souviens qu’elle pleurait, qu’elle se cachait. Je rentrais de l’école seul, elle ne m’attendait plus à la sortie. J’avais peur.

On est arrivé en Normandie en Septembre le jour de mon anniversaire, c’était le trois. Je venais d’avoir huit ans et mes copains, Bruno, Philippe, Claude et les autres, n’étaient plus là. J’étais seul dans un quartier de merde où le béton avait remplacé mes peupliers. J’allais commencer une vie déchiré, déchiré par la beauté d’un père.

Je n’ai jamais pu quitter cette région, j’y vis encore, et j’ai quarante et un ans aujourd’hui.

Quatorze Cent-Quarante-et-Un
(alias Daïdou)

Vacances

Lors de la parution de cet article je serai ici :

avec Ana, Éric et le p’ti Zèbre.

Je pense fort à vous, les doigts de pieds en éventail, la tête sur le sable à déguster un Ouzo. Nous vous souhaitons de bonnes vacances à tous!!!

Gros bisous.

Quatorze Cent-Quarante-et-Un
(alias Daïdou)

Les vestiaires

Gay Pride 2009 : Éric, mon fils, était présent à nos côtés. Mon p’tit Zèbre et moi défilions comme chaque année aux côtés de l’association des « Parents Gay et Lesbien ». Éric montait et descendait du petit train au gré de ses fatigues. J’étais heureux que mon fils soit à côté de moi, de nous. Il trouvait que le drapeau était beau avec toutes ces couleurs. Il en voulait un pour l’accrocher au mur, dans sa chambre. Je lui ai répondu qu’il était un peu jeune pour militer et qu’un tel objet pourrait être mal interprété par ses copains. Après avoir subi un véritable lavage de cerveau, le p’tit Zèbre succomba à sa demande. Tout content d’en avoir trouvé un, il offrit à Éric un immense drapeau arc-en-ciel qu’il déplia pour se rouler dedans jusqu’à la place de la Bastille (comme discrétion il y a mieux)…

Le drapeau est toujours là, sur le mur de gauche en entrant dans sa chambre. Je me souviens du jour où on lui à trouvé sa place. Je m’évertuais à lui chercher un endroit discret dans un recoin entre son bureau et le muret. Non, il voulait qu’on le voit! « Faut pas avoir honte! Il faut assumer » qu’il m’a dit. Mais assumer quoi? « Mon père est homo et ma mère aussi, je ne veux pas m’en cacher ». Je n’ai pas su à ce moment lui raconter le monde cruel et sans cœur dans lequel il vivait. Il y serait bien confronté un jour et ce jour est arrivé, il y a quelque jours.

C’est en allant chercher Éric à son club de natation qu’une vieille ombre traversa un instant la pièce chargée d’une douce odeur chlorée. Les corps de ces jeunes adultes, sculptés dans le roc, chahutaient dans une ambiance virile. Les enfants les regardaient avec une demie appréhension et une admiration sans faille. Fallait les voir se toucher, s’agripper, dans une excitation à la limite de l’éros. Une serviette claqua sur le petit cul rebondi d’un des leurs, une claque, un soufflet qui laissa sans aucun doute une légère marque rouge. Le visage de ce gaillard se crispa dans une aimable expression de douleur. « Sale Pédé » lança t-il. Alors l’auteur de l’outrage se précipita sur sa proie, se lova juste derrière lui tout en l’enserrant fermement par la taille. Les regards médusés des enfants laissèrent place à l’appréhension. Le jeune homme souleva sa victime collant son sexe à moitié dur sur le derrière fessu de son partenaire. « Je suis pas pédé mais fais gaffe à ton p’tit cul, je pourrais bien te l’exploser un jour avec ma grosse (bippp)… ». Puis il le projeta dans les bras d’un autre athlète.

– Papa, qu’est-ce qu’il a voulu dire : « Je pourrais bien t’exploser ton cul? » s’enquit Éric alors que nous étions seuls dans la voiture.

Franchement, je n’avais pas envie de répondre et pas envie non plus de me débiner. Les enfants sont curieux et si leurs questions restent sans réponses, elles reviendront un jour vous claquer sur votre arrière train!

– Tu sais, ils s’amusaient, ils disaient ça pour rire…
– J’avais pas l’impression qu’ils s’amusaient tous!
– Je ne vais pas te faire un dessin. Tu sais comment un homme et une femme se témoignent leur amour?
– Oui, ils s’embrassent!
– En effet, ils s’embrassent et parfois ils font l’amour.
– C’est quand le papa met son sexe dans celui de la maman?
– Je vois que tu en connais un rayon… aussi quand deux garçons s’aiment, ils manifestent leur affection de la même manière.
– Mais ils ne peuvent pas! Comment tu peux mettre un zizi dans un autre?

Les bras m’en sont tombés.

– Je pense que l’on pourrait continuer cette discussion dans quelques mois, ou dans quelques années, tu comprendras mieux ces choses-là.
– Si tu veux.

Me voilà enfin rassuré. Je pouvais conduire tranquille.

– Je crois comprendre, me dit-il après un long moment de méditation.
– Comprendre quoi?
– Ben, tu sais le garçon de tout a l’heure, il a dit qu’il pourrait lui exploser les fesses. C’est ça? C’est comme ça que deux hommes font quand ils veulent faire l’amour?
– Euhmmm… disons « qu’exploser » n’est pas le terme que j’emploierais. Je dirais que le sexe d’un des deux partenaires s’introduit dans le corps de l’autre par l’orifice anal.
– Par le trou du cul? dit-il dans un éclat de rire!
-Voilà, tu as trouvé par toi-même! un peu gêné tout de même.
– Et deux femmes entre elles? comment font-elles?
– Je ne veux pas me défiler mais peut-être que tu pourrais en discuter avec ta mère?
– Au fait, j’aurai un gros sexe quand je serai plus grand? Comme le garçon des vestiaires?
– Tout d’abord, il était en érection et je ne pense pas qu’elle soit franchement grosse, elle est normale. Mais pour te répondre, l’amour n’est pas une question de longueur ni de grosseur. Ne t’inquiète pas ton sexe va continuer à grandir normalement.

Hier, c’était son premier jour de vacances. Éric voulait en profiter pour inviter des copains à venir jouer avec lui. N’étant pas là, j’approuvai quand même son initiative. Le soir même, je l’interrogeai sur sa journée. Il paraissait heureux, je décelai une légère excitation.

– Ben, on a joué au « Monopoly », à la wii et on a fait une « Gay Pride ».
– Tu veux bien m’expliquer ton dernier jeu?
– On s’est déguisé avec les affaires d’Ana et puis on a défilé dans l’appartement avec le drapeau. On a même mis de la musique un peu fort!

Le soir même, j’ai reçu deux coups de téléphone: celui de ma voisine et celui d’une maman. La voisine voulait attirer mon attention sur le boucan qu’avaient fait les enfants cet après-midi. La mère voulait porter plainte contre moi! Éric aurait expliqué à sa progéniture comment deux hommes font du sexe entre eux… et puis les « Gay Pride » c’est dépravant avec tous ces homosexuels et ces travestis à moitié nus… elle ne comprenait pas comment mon fils pouvait savoir toutes ces choses horribles!

– Madame, je suis embêté pour vous de vous obliger à entendre cela, mais je suis homosexuel et je vis avec mon amoureux depuis 4 ans maintenant.

Elle en est restée sans voix.

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Les Garçons Dans Les Vestiaires – Clarika

Les garçons ont dit-on
De drôles de manières
Dans les vestiaires
Ils boivent l’alcool au goulot
Poussent des cris d’animaux
S’arrosent de parfum bon marché
Ouvrent leurs bières avec les pieds

Ah, les garçons dans les vestiaires ah
Ah, les garçons dans les vestiaires
Les garçons ont dit-on
Des mœurs singulières
Dans les vestiaires
Ils porteraient sur les hanches
Des serviettes qui quand ils penchent
Laissent entrevoir dans les vapeurs
L’objet du délit prometteur
Ah, les garçons dans les vestiaires, ah
Ah, les garçons dans les vestiaires, ah

Ah, si j’étais un garçon
Je saurais ce qu’ils font
Dans les vestiaires ah
Ah, si j’étais Paul ou Léon
Ou même un porte-savon
Un courant d’air

Les garçons ont dit-on
L’humeur parfois légère
Dans les vestiaires
Ils planqueraient sous leurs Adidas
Des revues pleines de créatures
Posant nues sur des pics à glace
S’adonnant à la luxure

Ah, les garçons dans les vestiaires ah
Ah, les garçons dans les vestiaires
Les garçons, ils se font
Des plaisirs solitaires
Dans les vestiaires
Ils ferment les yeux sous la douche
Et rêvent que des filles alanguies
S’en viennent en bande et à pleine bouche
Dévorer leur anatomie
Ah, les garçons dans les vestiaires, ah
Ah, les garçons dans les vestiaires, ah

Ah, si j’étais un garçon, je saurais ce qu’ils font
Dans les vestiaires
Ah, si j’étais Pierre ou Simon
Ou même un porte-savon
Un courant d’air, ah
Ou un short en coton
Une paire de crampons, une genouillère
Ah, si j’étais un garçon, je saurais ce qu’ils font
Dans les vestiaires.

Quatorze Cent-Quarante-et-Un
(alias Daïdou)

Passer au crible

C’est toujours étonnant comment viennent les idées d’article pour One F.P.M. et ma rubrique « Gay, père et passe ».

Celui-là, je ne l’avais pas prévu. Je peux même dire que je n’avais encore aucune idée ce mercredi après midi. La tension montait à chaque heure passée, j’attendais un courriel incendiaire de janjacQ ou de Tto … Et puis qu’allais-je vous raconter?

J’ouvre l’espace de réception de ma messagerie « contact@14141.fr »: un mail d’une journaliste de « TXXX », une journaliste à qui j’avais adressé quelques mois auparavant mon témoignage. Je ne me souviens plus trop du contenu mais cela parlait de moi, de mon p’tit Zèbre et de mon ex-femme. J’apprécie tout particulièrement son travail journalistique, j’ai même lu un livre qu’elle a écrit traitant de l’homosexualité au cinéma (que je vous conseille de lire au passage).

Voici le corps de son message : « Je me permets de vous contacter concernant l’appel à témoins pour le dossier de « TXXX » sur les *ex-hétéros*, lancé il y a déjà quelques mois. Votre témoignage m’intéresse beaucoup et j’aimerais en parler plus longuement avec vous. Puis-je me permettre de vous poser des questions par écrit pour commencer, avant de vous téléphoner éventuellement pour compléter l’entretien, si cela vous convient ? »

C’est justement le questionnaire que j’attendais! Un questionnaire qui répondrait aux zones d’ombre. Je vous livre en pâture mes réponses.

– Quatorze Cent-Quarante-et-Un, comment s’est révélé ce changement de sexualité ?

Pour être honnête, je ne me suis jamais vraiment posé la question de la sexualité. Ou peut-être à l’adolescence répondant par l’indécision : sexuellement j’éprouvais un désir partagé pour les femmes et les hommes. Avant de rencontrer ma femme, j’avais eu déjà des amourettes masculines et féminines. Je n’avais pas un besoin primordial d’alterner. Je tombais amoureux, voilà tout, et ma sexualité suivait mes sentiments. Et puis j’ai fait la rencontre de Céline sur Paris. Elle était douce, adorable, sensible, intelligente… j’en suis devenu totalement amoureux. Dès le premier mois de notre rencontre, je l’ai mise au courant de ma particularité amoureuse. Cela ne posait pas de problème en soi. Sexuellement nous étions en parfait accord, cherchant même à nous étonner. Nous avons eu deux merveilleux enfants, une fille et un garçon. Nous vivions dans une harmonie relative jusqu’à ce que j’apprenne le mal qui rongeait ma femme et notre histoire. Je l’ai quittée et mon chemin a croisé celui de mon p’tit Zèbre. Je suis tombé sous son charme, puis dans son lit! Ma sexualité a suivi de nouveau mon cœur d’artichaut!!! Mais aujourd’hui, après quelques années partagées avec ce futur trentenaire, ma sexualité est plus présente que jamais, découvrant ainsi une partie de moi insoupçonnée. Cette relation a été comme un révélateur de ma sexualité car mon partenaire alimentait mes fantasmes avec les siens et vice-versa.

– Quelle était votre vie « avant » ?

Ma vie d’avant? Comme tout un chacun je crois. Un couple d’hétérosexuels dans toute sa splendeur! Un vrai modèle de sainteté à tel point que l’on aurait presque pu nous enfermer dans un musée ou un zoo! Deux enfants, des tonnes d’amis qui n’en sont plus, une maison, des chats, une belle famille tordue. Nous partagions les mêmes valeurs, des valeurs judéo-chrétiennes, celles-là mêmes qui avaient cimenté notre histoire d’amour quelques années plus tôt. Je n’avais aucun désir sexuel pour un autre ou une autre. Ma vie me semblait presque parfaite jusqu’à l’arrivée de la maladie. Puis nous avons glissé lentement vers une relation déséquilibrée dans laquelle je me suis senti étranger. Quand j’ai senti le point de non-retour, j’ai brisé le lien.

– N’avez-vous jamais identifié en vous de désir homosexuel ? et chez votre ex-femme ?

Ma première histoire d’amour, je l’ai vécue à 11 ans. Il s’appelait Nicolas (h+ 4150 – Nicolas). La seconde histoire fut à 15 ans, elle s’appelait Laurence. Ma sexualité n’a que suivi mes sentiments et non le contraire.

En ce qui concerne ma femme, cela est un peu plus compliqué… je l’ai connue grâce à ma cousine. Un lien fort les unissait. Je me suis immiscé dans leur relation avec toute la fraicheur et la violence de mes vingt-deux ans. Ma cousine a souffert longtemps de cette irruption. J’étais amoureux et ne voyais pas les blessures qu’allaient engendrer mes actes. Après la séparation, j’ai discuté longtemps avec ma cousine. Elle m’a révélé que sa relation avec Céline était très équivoque.

Dans la seconde moitié de vie commune, nous avons sympathisé avec une jeune femme, Aurore. Elle se disait ouvertement bisexuelle et sortait avec Didier, un squelette du Marais qui me faisait les yeux doux. Aurore était un personnage complexe et insaisissable. Collègue de ma femme, elle aimait venir chez nous, s’occuper des enfants et profiter de nos derniers instants de bonheur. Nous étions le couple parfait à ses yeux malgré son aversion pour cette race de reproducteurs. La maladie de ma femme a pris à cette période un drôle de visage : dans une soi-disant recherche de soi, Céline prit un certain nombre de décisions seule: elle se fit couper les cheveux à une longueur de 2cm par Aurore… elle fit ceci sans moi… elle partit en week-end et en vacances avec Aurore … elle ne mangea plus de viande comme Aurore… elle décida que l’on ne devait plus faire ceci ou cela, et ma famille non plus et sa famille aussi… que nous ne devions plus voir un tel ou une telle car Aurore ne les aimait pas…  Même quand elle n’était pas là, Aurore était présente! Et les enfants? Ils avaient un peu perdu leur mère. A cette période, je suis tombé gravement malade, une saloperie qui attaquait mon estomac. Je me suis retrouvé alité quelques semaines. Céline qui de nature était prévenante ne l’était plus. Elle ne pensait qu’à elle. Elle ne vivait que pour elle et Aurore. Je me souviens du jour où je lui ai dit. Elle est tombée des nues, m’a t-elle dit. Elle ne voyait pas les choses comme ça. Alors de toute ses forces, elle a viré Aurore! Viré l’amour qu’elle lui portait. Mais cela n’a fait qu’empirer son état. A ce moment précis j’ai ouvert les yeux sur l’homosexualité de ma femme.

Quelques années plus tard, à un dîner entre amis, le sujet de l’homosexualité et de la bisexualité fut invité à table. Tout le monde ou presque était ouvert à une histoire d’amour avec une personne du même sexe, excepté Céline. Elle ne se voyait pas avoir des relations sexuelles avec une femme…

– Comment s’est faite la transition couple hétéro/couple homo ?

Plutôt bien, même très bien. J’ai eu de la chance de tomber amoureux de lui! Il fut patient, même très patient. Il ne s’est pas déclaré avant que je n’ai rompu définitivement avec ma femme même s’il en crevait d’envie! Nous nous sommes croisés par le biais du travail et rencontrés sur un site de «rencontre» pour finir dans le même lit. Il est évident que la transition est plutôt radicale: passer d’un couple presque parfait à un couple homo pas du tout parfait, cela crée des grands écarts douloureux. La vie en province n’est pas propice à ce genre de changement… se tenir la main en plein centre ville… les amis qui ne veulent plus vous voir, qui font des faux témoignages pour le juge… les voisins qui ne vous disent plus bonjour… et puis inversement les codes de la communauté gay à apprendre, les bars, les soirées parisiennes, la gay-pride… j’avais un peu l’impression d’être un extraterrestre d’un côté comme de l’autre, le cul entre deux chaises!

– Comment ont réagi vos proches ?

Classique : tu n’es plus mon fils, je ne veux plus te voir… Non, ce n’est pas vrai! J’ai une famille en or. Mes frangines et mes parents furent surpris. Cependant quand ils ont rencontré pour la première fois mon amoureux, ils ont été conquis! Au fil du temps, ils ont même eu l’impression de me retrouver.

– Quelles ont été les principales difficultés ?

Les enfants? Aujourd’hui il est évident que nos enfants subissent plus nos choix de partenaire qu’ils ne se résignent à la séparation. Même si eux aussi bénéficient du bien-être dans lequel j’évolue, l’homosexualité reste un problème. Ma fille souffre du manque d’une présence féminine par le fait de sa non-relation à sa mère. Et puis l’adolescence est une période complexe… La recherche de soi, de sa sexualité sont autant d’éléments parasités par notre histoire. Leur environnement classique a été légèrement chamboulé… et puis leurs copains et copines ne sont pas toujours ouverts à cette problématique.

– Quelle expérience tirez-vous de votre parcours ?

Je risque d’être d’une banalité et un peu « cucul » mais j’assume: ne jamais lutter contre ses sentiments! Savoir s’écouter et ne pas attendre que les choses s’arrangent sans vous! Suivre son chemin de vie en prêtant attention à ce que vivent les autres.

– Votre compagne a-t-elle vécu le même genre d’expérience avec sa propre famille ?

Non, malheureusement pas. Ce fut difficile et cela l’est encore. Mais cela tient sans aucun doute à l’hystérie pathologique de sa mère et à l’homosexualité refoulée tendance perverse de son père… En tout état de cause, les enfants n’ont pas eu de grand-parents pendant trois longues années et en ont souffert inutilement.

(illustration choisie par JjQ qui est un peu nipponophile –seulement– sur les bords )

Quatorze Cent-Quarante-et-Un
(alias Daïdou)